Goering... Toxicomane...
Avant tout cynique et sans foi ni loi

Le paladin de Hitler, qui ne manquait pas d'une certaine bonhomie en raison de son physique, était, en fait un dangereux toxicomane, s'adonnant régulièrement à la morphine, à la cocaïne et à la codéine. Un ministre qui a longtemps travaillé avec lui a déclaré : Etre immoral et criminel, son comportement était si théâtral qu'on ne pouvait le comparer qu'à Néron. Mais, une fois désintoxiqué par les médecins américains lors du procès de Nuremberg, Goering apparut comme un redoutable debater, brillant par son intelligence et ses dons d'orateur ! En fin de compte, Goering frappe par son infantilisme, son égocentrisme, son besoin de paraître, son désir de puissance, autant de symptômes signant une immaturité affective manifeste, expliquant des besoins affectifs de substitution.

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Goering le toxicomane
L'histoire de l'intoxication de Goering est tout à fait celle des intoxiqués accidentels qui formaient à cette époque la majeure partie des morphinomanes.
Goering fut blessé une première fois en 1916 puis une seconde fois au niveau de l'aine droite lors d'une fusillade à Munich à l'occasion d'une tentative de prise du pouvoir. Il reçoit ses premières injections de morphine car il souffre beaucoup ; en moyenne deux piqûres par jour. Goering continuera à s'adonner à la morphine en prétextant des douleurs intolérables provenant de ses blessures. Dans certaines circonstances, il sait qu'il peut compter sur la morphine pour être plus joyeux et plus exubérant.
En 1925, Goering retourne en Suède où vivent ses beaux-parents et il accepte une cure de désintoxication pendant trois semaines. On avait alors sous-estimé les doses de morphine qu'il s'administrait et les médecins suédois crurent pouvoir ordonner un sevrage brutal. Il y eut quelques difficultés, des moments de manque et de délires. Les médecins suédois, convaincus d'avoir affaire à un simulateur ou à un petit malade mental, utilisèrent une méthode de sevrage lent. On possède les documents cliniques indiquant les types de produits de substitution et les calmants utilisés pour combattre les effets de la privation de morphine. Goering rechute assez rapidement, de telle sorte qu'on peut admettre que Goering n'a jamais abandonné ni la morphine ni la cocaïne et qu'il dut à plusieurs reprises, longtemps plus tard, se soumettre à des cures énergiques, la dernière ayant été ordonnée par les médecins américains après son arresta tion.
Outre sa toxicomanie, Goering était un bon vivant, succombant périodiquement à des crises de boulimie. En 1933, lors de la prise du pouvoir par Hitler, il pèse 127 kg. En 1939, Goering contracta une nouvelle toxicomanie vis-à-vis de la paracodéine, extraite de l'opium, qui est un calmant efficace, plus couramment employé sous forme de sirop contre la toux ; il en prenait dix comprimés par jour tout en se piquant avec des injections de morphine. Lors de l'offensive contre l'Angleterre, Goering absorbait trente comprimés de paracodéine par jour.
Lors de son arrestation Goering avait avec lui deux valises pleines de pilules de codéine et ressemblait à un démarcheur en produits pharmaceutiques; il fut immédiatement confié aux soins de deux psychiatres. Lorsqu'il fut transféré à la prison de Nuremberg, en septembre 1945, Goering avait perdu 36 kg et ne pesait plus que 91 kg. Il est intéressant de noter que Goering n'accepta une cure d'amaigrissement que lorsqu'il sut qu'il comparaîtrait devant un tribunal international.

goering et hitler
Personnalité de Goering
Généreux pour certains, sentimental pour d'autres, il fut avant tout un être cynique sans foi ni loi comme en témoignent de nombreuses reparties qu'il fit au procès de Nuremberg lors de ses interrogatoires successifs par les procureurs des pays alliés. Le plus bel exemple de cynisme de cet homme est représenté par ses propres paroles au sujet de la projection des films tournés dans les camps de concentration : « Jusqu'à ce qu'ils passent ces films, c'était un bon après-midi, on lisait mes conversations téléphoniques à propos de l'affaire autrichienne et tout le monde riait avec moi et puis ils ont passé ces films épouvantables et cela a tout gâché. »
Il en va de même pour ses commentaires au sujet des films russes : « N'importe qui peut fabriquer un film d'atrocités. Il suffit de déterrer les cadavres et de montrer un tracteur qui les enterre à nouveau. » Il a constamment nié sa participation, malgré les preuves établies, à différents crimes et assassinats et sa responsabilité dans le déclenchement et la conduite de la guerre. C'est le même cynisme qu'il affiche dans la conversation qu'il a avec le psychiatre américain au sujet de Röhm. Constatant qu'avant de devenir rivaux ils avaient été des amis sincères, le psychiatre Kelley l'interrompit pour lui demander comment il avait pu faire une chose pareille à un ami. « Goering s'arrêta de parler et me regarda avec surprise, comme si j'étais un demeuré. Ensuite il haussa ses larges épaules et me dit lentement en appuyant sur chaque syllabe : "Parce qu'il me gênait ! " »
Pendant les années de son intoxication certains traits de la personnalité de Goering sont exaltés à la limite de la caricature : sa colère devient violence comme on pourra s'en rendre compte lors du procès de l'incendie du Reichstag en septembre 1933. Pendant la guerre, accablé par les revers de l'invasion allemande, Goering en vient à insulter les pilotes allemands, leur reprochant leur inefficacité ou les accusant d'avoir gagné leurs décorations par le mensonge.
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Bouffi et arrogant
Ciano, l'ancien ministre des Affaires étrangères de Mussolini, notait dans ses carnets : « Goering est le plus humain des chefs allemands, mais c'est un émotif et un violent qui pourrait devenir dangereux. »
Il est méticuleux pour les soins de sa personne et se poudre après le rasage ; d'autre part, il possède une garde-robe très importante tant d'habits civils que d'uniformes dans lesquels il aime à se pavaner. Il est très exigeant quant à leur coupe. Il dessinera lui-même celui de Grand Veneur, un de ses nombreux titres ronflants, et celui de la Luftwaffe.
Conscient de son importance, il se dote d'une police personnelle ; d'autre part, il se fit établir un arbre généa logique fictif reliant directement sa famille à Frédéric de Prusse et à Charlemagne ; il s'efforça de faire admettre ces fables aux psychiatres chargés de l'examiner lors du procès de Nuremberg. Toutes les cérémonies familiales étaient l'occasion de déploiements grandioses et pompeux. C'est ce même goût de l'apparat allié à celui du luxe qui le fit multiplier ses lieux de résidence et les embellir constamment : il disposait de plusieurs palais résidentiels, de deux châteaux et d'un ancien rendez-vous de chasse royal. Goering embellira ses demeures de toutes les oeuvres d'art qu'il aura pillées en Europe sur les traces des soldats allemands. A propos de ce goût pour l'art, qui était très classique, il lui arrivera de s'appeler le dernier homme de la Renaissance.
Sa vantardise devient fanfaronnade. Ciano le dépeint bouffi et arrogant ; il se pavanait béatement devant les officiers italiens qui l'accueillaient. Le célèbre aviateur Milch confirme : Je n'étais pas dupe de ses accès de vantardise. J'avais déjà été confronté à sa grande vanité et à son égoïsme et je savais que quiconque le blessait dans son orgueil vivrait pour le regretter.
Son dégoût pour le travail intellectuel ne fait que s'accroître. Goering déteste les papiers et ne lit plus les rapports qu'il signe. Il ne comble pas ses lacunes en matière d'aéronautique. Il essaie de dissimuler son ignorance et ne tente jamais d'y remédier. Il manque totalement de professionnalisme dans les divers secteurs que Hitler lui confie. Il ne prépare pas ses discours mais se contente de
slogans démagogiques.
Sa tendance à la mégalomanie s'accroît considérablement. Quand il se lève, son valet met le disque de la marche des héros du Crépuscule des dieux ; Goering était un fervent lecteur des aventures de Gengis Khan car il avait conçu une véritable passion pour tout ce qui concernait ce conquérant sanguinaire. Sa bibliothèque privée contenait tous les ouvrages publiés sur cet homme de guerre asiatique.
Certains caractères nouveaux apparaissent avec l'intoxication par la morphine. Le jeune officier svelte et fringant est devenu obèse, atteignant le poids de 127 kilos en 1938. Il est devenu sujet à des crises de dépression et à des brusques changements d'humeur. Il a des accès de rage imprévisibles et il fait quelques allusions à des possibilités de suicide. On sait qu'à Nuremberg il se suicidera, sans doute par volonté d'affirmer son rang parmi les autres accusés jusque dans la mort, mais aussi peut-être par peur d'affronter le supplice, c'est-à-dire la mort par pendaison.
Goering fait preuve d'un infantilisme invraisemblable : il était un dangereux chauffard qui s'obstinait à rouler à gauche en klaxonnant sans trêve pour signaler son approche.
Dans sa villa préférée, il s'est fait installer pour lui tout seul un train électrique et il avait imaginé une escadrille de petits bombardiers qui lâchaient leurs bombes sur les trains.
Lors d'une contrariété, il prend l'habitude de se calmer en manipulant des pierres précieuses. Ciano raconte dans son journal : « Comme il manifestait pendant le voyage une certaine nervosité, son aide de camp lui apporta un petit vase plein de diamants. Il les mit sur la table et commença à les compter, les aligner, puis à les mélanger de nouveau ; cela lui permit de retrouver sa bonne humeur. » Son goût pour les médailles et les uniformes fut à l'origine d'une plaisanterie : on disait que le paladin de Hitler avait commandé une série de médailles en caoutchouc de façon qu'il puisse les porter dans sa baignoire.
Un Néron moderne
En conclusion de cette analyse détaillée de la personnalité de Goering, il faut citer le célèbre portrait que l'ancien ministre Schacht avait fait de lui et qui fut lu par le juge Jackson au tribunal de Nuremberg : « J'ai décrit Hitler comme un personnage amoral, mais je ne puis considérer Goering que comme un être immoral et criminel. Doué d'une certaine bonhomie naturelle qu'il sut utiliser pour se rendre populaire, c'était l'individu le plus égocentrique que l'on pouvait imaginer. Le pouvoir politique n'était pour lui qu'un moyen de s'enrichir personnellement et d'avoir une vie personnelle agréable. Le succès des autres le remplissait d'envie. Sa cupidité ne connaissait point de limites. Sa prédilection pour les pierres précieuses, l'or, les bijoux, était inimaginable. Il ignorait la camaraderie. Ce n'était que dans la mesure où quelqu'un lui était utile qu'il le traitait en ami, mais cela restait superficiel.
Son comportement était si théâtral qu'on ne pouvait le comparer qu'à Néron. Une personne qui prit le thé avec sa seconde femme rapporta qu'il était apparu vêtu d'une sorte de toge romaine avec des sandales ornées de joyaux, les doigts couverts d'innombrables bagues et ruisselant de pierreries de la tête aux pieds. Son visage était maquillé et il avait du rouge à lèvres ".
Un portrait accablant, on le voit, comparant Goering à Néron et permettant de souligner la personnalité monstrueuse du paladin de Hitler.
Lorsqu'on reprend les récits des différents psychiatres suédois et américains qui ont analysé le caractère de Goering, on note une grande forfanterie qui pouvait passer pour de la bravoure car Goering aimait à défier les événements : mais c'est surtout le désir de paraître, de faire de l'effet qui perçait à travers tous ces récits, les traits hystériques sont des éléments importants dans le portrait de Goering. En bref, les observations concordent pour mettre en évidence une personnalité immature, ce qui permet, selon les psychiatres, de soutenir la notion d'une personnalité psychopathique prémorbide chez Goering.

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