La capitulation française
à Rethondes le 22 juin 1940

L'armistice
le 22 juin 1940

Le 22 juin, à Rethondes, l'armistice est signé; il entre en vigueur le 25. La moitié Nord et la côte atlantique seront occupées : les forces françaises doivent être désarmées et démobilisées; les frais d'entretien des troupes d'occupation incombent à la France; les réfugiés politiques allemands doivent être livrés au Reich.
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Dans la petite ville du Blanc qui commande un des passages de l'Indre, un certain nombre de maisons avaient été détruites par des bombes d'avions. J'eus l'occasion de m'entretenir avec une brave femme qui tenait commerce près du pont. Comme sa maison était intacte et que je l'en félicitais, elle me dit :
« Ah ! oui, monsieur, nous l'avons échappé belle!
En effet, les bombes sont tombées près de vous.
— Ce n'est pas cela, mais le pont!
— Le pont ?
— Oui, monsieur, croirez-vous que le commandant de la place, un vieil imbécile, avait fait miner le pont.
Il voulait défendre la ville. Oui, vous pouvez encore voir les trous de mines. Et tout devait sauter quand les
Allemands arriveraient ! Alors nous aurions sauté aussi ! Heureusement les anciens combattants ne l'ont pas permis. Ils sont venus en force et ils ont éteint les mèches qui étaient déjà allumées.
— Alors les Allemands sont entrés sans coup férir ?
— Oui, et comme cela il n'y a pas eu de dégâts. Mais vous voyez ce qui aurait pu arriver avec ce vieil idiot.
»
Témoignage
Ah ! oui, monsieur, nous l'avons échappé belle!

Séparer la France et l'Angleterre

Armistice du 22 juin 1940
Le matin du 17 juin 1940, en effet, la demande française était arrivée au grand quartier du Führer par le canal du ministre des Affaires étrangères espagnol. Dès lors, Hitler pouvait donner à l'O. K. W. des directives fermes, tant sur le fond que sur la forme des conditions qu'il voulait imposer. Elles étaient en conformité avec sa politique française du moment, elle-même envisagée dans le cadre général de la politique de guerre.
Hitler avait, la veille, expliqué au général Vigon, attaché militaire espagnol, que son but de guerre était de faire perdre une fois pour toutes à la France et à l'Angleterre leur position dominante dans le monde. Il voulait donc d'abord (et telle serait l'idée de base de l'armistice) amener la France à se séparer de l'Angleterre pour s'arranger avec l'Allemagne.
Il fallait faire un « pont d'or » au gouvernement Pétain pour qu'il laisse tomber son allié et renonce à l'Entente cordiale. Il était donc nécessaire que les conditions parussent acceptables à la France, un refus l'entraînant à continuer, grâce à la flotte, la lutte dans l'empire, ce qui ne ferait que renforcer la position de l'Angleterre et sa volonté de résistance.
Avec des conditions adoucies, on pouvait espérer briser l'unité du front de guerre de la France et de ses alliés et faciliter la poursuite de la guerre contre l'Angleterre. Il fallait naturellement s'entendre avec les Italiens dont les prétentions excessives risquaient de compromettre la conclusion de l'armistice.
Ces diverses considérations imposaient les points suivants :
1. La souveraineté du cabinet Pétain devait être respectée si l'on voulait prévenir toute sécession coloniale. Il fallait donc prévoir une zone non occupée.
2. L'occupation de la métropole devrait permettre la poursuite de la guerre contre l'Angleterre et comprendre, pour cela, les côtes de l'Atlantique, la liaison Est-Ouest, Belfort—Nantes, et Nord-Sud, Tours—Bordeaux
—Saint-Jean-de-Luz.
3. Les forces françaises encore libres de leurs mouvements se retireraient en zone non occupée pour y être désarmées. Toutes les autres troupes seraient faites prisonnières. Le matériel de guerre de la zone occupée serait butin de guerre, on stockerait le reste sous contrôle allemand.
4. L'administration française continuerait à subsister sous contrôle allemand mais on ne ferait pas mention de la Convention de La Haye.
5. Les clauses territoriales ne devaient pas être soulevées dès l'instant que la conclusion de l'armistice pouvait être obtenue dans les circonstances présentes. On ne devrait pas parler non plus de l'Alsace-Lorraine. Toutefois une instruction de ce même jour, donnée à l'armée de terre, laisse pressentir ses intentions sur les exigences territoriales futures. Il y est recommandé de conquérir au plus tôt tout le territoire de l'ancien empire allemand jusqu'à la ligne Toul—Verdun—Belfort.
6. Malgré leur importance pour la lutte contre l'Angleterre en Méditerranée, on ne demandera pas à occuper de territoires en Afrique du Nord afin d'éviter qu'ils ne se révoltent.
7. La flotte française sera neutralisée, mais sa livraison ne devra nullement être demandée. Elle ne ferait que précipiter sa fuite vers les ports anglais.

Le wagon de l'armistice de 1918

Le wagon de l'armistice de 1918 à Rethondes en 1940
L’avant-veille, dans l’après-midi du 19 juin 1940, les soldats du Génie de la Wehrmacht s’étaient attaqué au vieux musée, avaient abattu ses murs à l’aide de foreuses à air comprimé et tiré le wagon historique jusqu’à la place qu’il occupait à présent. L’idée de la résurrection et de l’utilisation vengeresse du wagon de Compiègne était due à Gœbbels qui, diaboliquement, l’avait soufflée à son maître. .A 15h 25 précises, Hitler et sa suite gravissaient le marchepied et franchissaient le seuil du wagon. 
Moins de cinq minutes plus tard, un groupe de six hommes hébétés et harassés déboucha dans la clairière de Rethondes. C’étaient les Français
A travers les chemins de la plus lourde et de la plus sombre défaite qui eût fondu sur la France depuis soixante dix ans, quatre militaires de hauts grades et deux diplomates, dont un ambassadeur, avaient, pendant plus de vingt heures, remonté le courant incessant des réfugiés civils embouteillant les routes, heurté le flot éperdu des fuyards et des armées en retraite, traversé des villes bombardées et abandonnées franchi les lignes allemandes sur un pont de la Loire, aux environs de Tours, avant de parvenir à Paris.
Depuis leur départ dans leurs dix voitures flanquées du drapeau des parlementaires, aucun des six hommes n’avait dormi.
Parqués dans un hôtel réquisitionné de l’avenue Hoche, le Royal-Monceau, ils avaient brusquement reçu l’ordre de poursuivre leur voyage vers une destination inconnue.
Ce fut seulement en pénétrant dans la forêt de Cornpiègne, baignée par le soleil d’été, qu’ils comprirent.
Les hommes noirs de la garde du Führer de l’Allemagne victorieuse montaient leur rigide et orgueilleuse faction. Pas un muscle de leur visage ne s’anima au passage des Français. Les six vaincus se hissèrent dans le wagon.
Ce fut le face à face historique, mêlant le passé et le présent. Un bref instant, le silence se fit et les regards s’aiguisèrent. Mais, dans celui des six Français, ne se lisaient qu’une intense stupeur et, peut-être, plus que tout, une Incommensurable lassitude.
Dans le grand compartiment oblong, Adolf Hitler, le premier de tous, s’assit à la place exacte où, en novembre 1918, s’était tenu Ferdinand Foch. Carré sur son siège, aux côtés de Gœring, de Raeder et de Brauchitsch, Hitler, ne desserra pas les dents.

Des statues de cire

Le second drame du carrefour de Compiègne se jouera en douze minutes. Ainsi que Weygand, naguère, le chef de la Wehrmacht, le colonel-général Wilhem Keitel, était resté debout dans le compartiment. Raidi de morgue empli  arrogante joie de la revanche. Le chef d’Etat-Major d’Hitler entama la lecture du préambule des négociations d’armistice, un monument de mensonge et d’orgueil, qui accusait la France de parjure et d’agression : C’est dans le même wagon, lut Keitel, que commença le calvaire du peuple allemand… Cet endroit a été choisi pour effacer une fois pour toutes, par un acte de justice réparateur, un souvenir qui, pour la France, n’était pas une page honorable de son histoire… La France est vaincue, poursuivit le général allemand. Le but de l’Allemagne est d’empêcher une reprise des hostilités, d’offrir aux armées du Reich toute sécurité pour poursuivre la guerre contre l’Angleterre…
Il avait fallu six minutes à Keitel pour débiter sa harangue plus six autres à Schmidt pour en traduire le texte aux Français.
Lorsque l’interprète eut achevé, Hitler se leva instantanément. Son rôle à lui était joué. C’était maintenant à Keitel, son représentant, de conduire les négociations, c’est-à-dire de communiquer aux plénipotentiaires français l’ultimatum auquel ils devraient se soumettre pour que l’Allemagne cessât le combat contre la France. Aussi longtemps qu’Huntziger. N’aurait pas signé, les hostilités naturellement se poursuivraient.
Suivi de son escorte, Adolf Hitler sortit du wagon. Jusque-là, se rappelle Paul Schmidt, «Français et Allemands étaient restés en face les uns des autres, les visages figés, comme s’ils avaient été tous des statues de cire».
Armistice 22 juin 1940

Négociations et signature de l'armistice

Signature de l'armistice du 22 juin 1940
A l’intérieur du wagon de Rethondes, assisté de l’interprète Schmidt et d’autres officiers d’état-major, Keitel s’installa en face d’Huntziger et des Cinq autres Français. La discussion pour l’arrêt de la guerre dura plus de vingt-sept heures. Pied à pied, les Français se défendaient ; mais c’était peine perdue.
A 18h 50 le samedi 22 juin, le général Charles Huntziger signa le traité de capitulation de la France devant le Reich hitlérien. Dans le wagon de Compiègne, un à un, les yeux brouillés de larmes, les Français se retirèrent. Keitel retint le dernier et adressa, à Huntziger, suivant son expression, quelques brèves paroles de soldat. Finalement, le vainqueur tendit la main au vaincu.
Cependant, le général- Huntziger s’excusa. Et, devait rappeler plus tard Keitel avec un certain dépit, il quitta le wagon en ne m’adressant qu’un bref et strict salut militaire.