Après les massacres ... La répression
repression à philippevile

Le nuage de sang dissipé, viendra l'heure des informations plus claires et des bilans. On se rendra compte que, dans cette journée du 20 août 1955, la chasse à l'homme commença d'abord, sur les ordres de Zighout, par la chasse aux Européens. En tout, de Constantine à Philippeville, à Jemmapes, à Catinat, à Hammam-Meskoutine et dans toutes les localités du Nord constantinois, 171 Français ont été massacrés. Dans la répression qui suivra, celle de l'armée et celle des civils, 1 273 musulmans seront exécutés. Un chiffre qui n'émut le F.L.N. que pour les besoins de sa propagande, car, en fait, c'est ce que cherchait Zighout Youssef pour relancer la révolution. Dès lors, le ver est dans le fruit, la peur dans chaque homme, quelle que soit sa communauté, et la méfiance s'installe.
D'une façon générale, la réaction de l'armée est vive, brutale. Partout, les attaques sont stoppées sous le feu des armes automatiques. Les paras sont engagés dans d'immenses opérations de ratissage et, dans le même temps, l'autorité militaire semble débordée par les groupes de civils européens qui battent le bled à la recherche des tueurs F.L.N. En effet, et c'est là une des conséquences les plus graves des massacres d'août 1955, la répression frappe dès lors tous les musulmans, jusque dans les douars les plus innocents, d'où de paisibles fellahs s'enfuiront pour échapper aux mitraillettes des commandos civils. Si l'armée attaque méthodiquement les P.C. du F.L.N. dissimulés dans les mechtas autour des centres européens désignés par Zighout Youssef, en revanche, les civils, emportés par le désespoir, la peur, et la haine aussi, ne font pas quartier.
Au slogan F.L.N. : Tuez tous les Français civils, répond le slogan pied-noir : Abattez tous les Arabes. L' escalade du sang commence. Elle va durer huit ans. Mais, d'abord, saper tragiquement le programme de réformes que Jacques Soustelle s'est efforcé de préparer, en homme de bonne volonté, dans l'espoir de sauver l'Algérie.

soustelle

Quand les premières dépêches parviennent au palais d'Eté, dans l'après-midi du 20 août, Soustelle prend immédiatement l'avion pour le Nord constantinois. Il débarque à Constantine, qui n'est plus qu'une ville en état de siège, sillonnée par des patrouilles militaires, jonchée de débris de meubles, de chaussures abandonnées dans des flaques de sang, de vitres brisées. Les façades sont mortes, les places désertes. La peur est partout. Militaires et civils le tiennent au courant des détails de ce samedi sanglant. Lourd bilan. Soustelle décide de se rendre sur place, comme il le fera toujours. Le dimanche matin, il parcourt Aïn-Abid et El-Halia, où les cadavres des victimes européennes sont alignés, sous le soleil, dans un silence sinistre, troublé parfois par des cris de douleur, de rage, des appels à la vengeance. Soustelle voit tout, écoute tout, boit cette coupe jusqu'à la nausée. Un autre Soustelle quittera les villages martyrs. Cet homme-là a compris que, désormais, il lui faudra se battre sur deux fronts. Contre le F.L.N., pour protéger les musulmans encore acquis à des réformes, et contre les meneurs pieds-noirs, qui exploitent le 20 août à des fins politiques personnelles.
Jacques Soustelle rentre à Alger bouleversé. Il donne des ordres pour que la justice soit appliquée rigoureusement aux tueurs musulmans, mais aussi pour que l'armée désarme les Européens les plus déchaînés. En réalité, on désarme peu d'Européens, et presque tous les prisonniers musulmans du 20 août sont passés par les armes. Désormais, l'insécurité va s'installer et plus jamais Jacques Soustelle n'acceptera, comme il l'avait fait quelques mois auparavant, de rencontrer des envoyés de l'adversaire pour un dialogue entre hommes de bonne volonté. En ce mois d'août finissant, commence le temps des assassins.

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