Deux torches qui courent
rideau
chars en 1917

Ah ! la belle aventure du camp de Champlieu ! Tant de gaieté, d'insouciance, de courage promis à la victoire et qui viennent sombrer dans l'inutile horreur !
L'incendie ! Il n'était pas dans nos prévisions.
Mais les constructeurs '1 Avaient-ils oublié, avant d'y faire périr tous ces héroïsmes, de bombarder les chars ? Un seul essai aurait suffit pour condamner l'absurde position, à l'avant; sous des blindages insuffisants, des réservoirs d'essence.
Nous ne reviendrons pas. La mort fauche nos chars, mathématiquement, comme une moissonneuse. Nous serons peut-être les derniers épis, mais les derniers épis tomberont comme les autres...

Ah ! les choses qu'on n'oubliera pas ! Les spectacles à jamais gravés dans les yeux, malgré tant d'horreurs qui s'y sont déjà burinées !
Le char de gauche, d'un coup, est devenu brasier. Devant lui, fume encore l'obus qui vient de l'incendier. Et deux torches s'échappent, deux torches qui courent, éperdues, follement, vers l'arrière, deux torches qui se tordent, qui se roulent sur -la terre...
— Oblique à droite... Oblique à droite !
Il ne faut pas que les hommes voient ça, par la 'fente de visée du mitrailleur de gauche. Il ne faut pas, moi non plus, que je continue à voir !...
Leseutre est livide ; je sens que je suis vert.
— Oblique à droite. A quoi bon ? Il y a trop de fentes de visée dans ce char. Ou trop de brasiers qui s'allument.
Un char flambe à droite, un autre derrière.
Et sur notre gauche, il semble qu'une main allume notre ligne de fer comme une rampe électrique.
Incendies; explosions.
D'un seul coup, les chars sont enveloppés de flammes et, aussitôt, dans un crépitement terrible, tout se déchire, se projette au ciel : soixante obus qui sautent à bord, les uns après les autres, et des milliers de balles !...

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Les premiers Chars