La mécanique des massacres pariseins
Les Massacres de Septembre tirent leur nom des événements qui se sont
déroulés du 2 au 6 septembre 1792 à Paris. Tout commence lors du
transfert de prêtres considérés comme suspects du dépôt de
l'hôtel de ville à la prison de
!'Abbaye, jouxtant l'église de Saint-Germain-des-Prés. Conspués,
maltraités, rnenacés durant tout le trajet, y compris par leur propre escorte. les ecclésiastiques sont à peine arrivés dans leur geôle
que la foule demande à ce qu'ils
soient promptement jugés.
Un
tribunal est rapidement improvisé. composé d'élus de la section des Quatre Nations (Paris était alors
divisé en quarante-huit sections
ou quartiers). Après un sommaire
Interrogatoire, dix-neuf des vingt quatre accusés sont exécutésà coups de haches, de baïonnettes,
de piques et de sabres.
Puis, sous
la direction de Stanislas Maillard,
l'un des héros du 14 juillet 1789 et,
depuis, figure politique importante
du Paris révolutiorinaire, d'autres
prisonniers sont interrogés. Le choix
n'est jamnais innocent. Les motifs de
l'incarcération permettent de faire
un premier tri. Puis une rapide
vérification d'identité est effectuée.
Quelques questions sont posées et
le tribunal statue. Si le suspect est
reconnu coupable, il est extrait de la prîson et massacré à peine la porte franchie.
Des massacres soigneusements préparés
Il semble bien que les massacres avaient été soigneusement préparés. En effet, la plupart des tueurs étaient à leur poste, et, de plus, des tribunaux populaires, institués pour examiner sur place les registres d'écrous et prononcer sur le sort des hôtes des prisons, se tenaient dans les geôles, prêts à fonctionner. Ces tribunaux révolutionnaires jouissaient d'un pouvoir qui eût effrayé sous un monarque absolu.
La création de ces tribunaux était due à Maillard, personnage assez énigmatique que l'Histoire a traité avec beaucoup trop de rigueur. Certes, Maillard ne fut pas un agneau, mais c'est à tort qu'on a classé cet homme parmi les tigres.
Lorsque commença l'agitation de la rue, on vit émerger du flot populaire un homme jeune encore, à l'allure sérieuse, au maintien décent, au langage correct, toujours vêtu de noir, qui paraissait n'avoir rien de commun avec les patriotes des faubourgs et leurs farouches compagnes et qui, pourtant, obtint facilement leur confiance. C'était Stanislas Maillard.
Maillard fit ses premières armes à la prise de la Bastille et conquit le titre de « capitaine des vainqueurs de la Bastille ». Dès lors, il jouera un rôle dans toutes les convulsions de la Révolution, ne cherchant, ne demandant rien, regagnant tranquillement son modeste hôtel de la rue Béthysi lorsqu'il ne juge plus sa présence nécessaire.
Se rendant compte, lors des arrestations d'août, que rien ne pourra empêcher les massacres, il essaie tout au moins de dresser une barrière, si mince fût-elle, entre les prisonniers et les bourreaux et obtient la création, dans les geôles, d'un simulacre de tribunal. C'était peu, mais c'était quelque chose. Nombre de personnes durent la vie à l'initiative de Maillard. Lui-même s'était réservé le poste le plus important, celui de l'Abbaye. Or il est constaté, même par les écrivains royalistes, que les acquittements furent beaucoup plus nombreux à l'Abbaye que dans les autres prisons.