Le docteur Ménétrel ...
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Menetrel et Petain
Que n'a-t-on pas dit au sujet du docteur Bernard Ménétrel. «éminence grise» du Maréchal. Qu'il était le fils caché de Philippe Pétain, alors qu’il était en réalité le fils du docteur Louis Ménétrel, ami et médecin du Maréchal jusqu'à son décès en 1936; qu'il était le filleul de Pétain, ce qui n'était pas vrai non plus, et résultait d'une confusion avec son frère Henri Ménétrel, tué pendant la Grande Guerre; que c'était un faux médecin, alors qu'il avait été interne des hôpitaux,chef de clinique et médecin assistant des hôpitaux avant de prendre la succession de son père auprès du Maréchal; qu'il pouvait imposer sa volonté à son illustre patient en le rendant dépendant de ses soins, alors que Pétain n'était pratiquement jamais malade; qu'il était communiste, alors que le docteur Ménétrel était certes russophile, mais antisoviétique; qu'il était pro -Allemands, alors qu'il détestait farouchement les Allemands en général, et les nazis en part iculier ; qu'il avait été cagoulard, parce que dans le Vichy de l'époque, on voyait des cagoulards partout; qu'il était le chef de cabinet du Maréchal, alors qu'il n'était en fait que son secrétaire particulier; que c'était un partisan de Pierre Laval, alors qu'il ne cessait de clamer urbi et orbi que Laval devrait être fusillé; qu'il était anglophobe,alors qu'il était anglophile jusqu'au bout des ongles; qu'il tenait Pétain sous son influence en l'accompagnant toujours dans sa promenade quotidienne, alors que le Maréchal ne s'intéressait en ces occasions qu'aux jeux des enfants, aux arrangements floraux et aux mines des passants...
A l'hôtel du Parc, son bureau donnait sur celui du chef de l'Etat, leurs chambres étaient voisines. Il n'y avait pas de secrets entre eux, et le délassement préféré du Maréchal était de jouer avec les deux petites filles du docteur Ménétrel, lequel était d'ailleurs son exécuteur testamentaire. En d'autres termes, ce médecin-secrétaire-ami-confident apparaissait parfaitement en mesure d'influencer le chef de l'Etat, pour peu que celui-ci ait été influençable, et que le bon docteur ait eu la vocation d'éminence grise.
la promenade de Petain
De toute évidence, il a participé pleinement au complot du 13 décembre 1940, visant à destituer et faire arrêter Laval; on ignore s'il a lui-même contribué à persuader le Maréchal de la nécessité de l'entreprise, mais il n'a pas manqué d'encourager et d'assister ceux qui l'ont menée à bien. On verra ce secrétaire très particulier intercéder (avec succès) auprès du Maréchal pour qu'il aide... un résistant alsacien ayant un besoin urgent de pneus pour accomplir ses missions de sabotage !
On le verra aussi intervenir pour tirer des griffes de la police allemande le docteur Etienne Bernard, fils de Tristan Bernard, et batailler ferme pour que le Maréchal puisse adresser le 13 novembre 1943 un message aux Français annonçant l'acte constitutionnel relatif  à la succession du chef de l'Etat.  Cet acte étant à l'évidence dirigé contre le dauphin Pierre Laval ; celui-ci dira à cette occasion: «Le petit Ménétrel n'a qu'à bien se tenir. Je l'ai sauvé plusieurs fois des Allemands, je ne le sauverai pas de ma police !»
Il est exact que les Allemands ont envisagé à plusieurs reprises d'arrêter ce docteur plutôt remuant, que les collaborationnistes à Paris l'attaquent violemment dans leurs journaux, et que Ribbentrop lui-même écrit au Maréchal le 29 novembre 1943 une lettre menaçante, l'informant des «propos hostiles à la collaboration» tenus par son secrétaire particulier. L'année suivante, en dépit d'une surveillance accrue des Allemands à Vichy, on verra Ménétrel se mettre en relation avec le Vatican, avec des membres de l'Abwehr opposés à Hitler, et même avec des éléments de la Résistance pour organiser une fuite du Maréchal vers les maquis au début d'août 1944...
Le 20 août, le Maréchal et sa suite seront enlevés de Vichy par les Allemands, et emmenés en Allemagne. Mais une fois à Sigmaringen, le courageux médecin continue à livrer une bataille solitaire contre les Allemands et contre Brinon, qui prétend asseoir l'autorité de sa commission de gouvernement en se servant du nom du Maréchal.
J'avais tout prévu, dira méchamment Pierre Laval, sauf que la France serait gouvernée par un docteur. C'est évidemment très exagéré, mais le 22 novembre 1944, les Allemands finissent par arrêter le petit docteur, qui ne sera libéré à la fin de la guerre que pour être enferrmé à la prison de Fresnes, en tant que collaborateur !
S'il est vrai que le Maréchal, prenant rarement au sérieux les idées politiques de son médecin et ami, lui disait le plus sou­vent de se mêler de ses affaires, il n'en demeure pas moins que le docteur Bernard Ménétrel, sous des dehors falots et insouciants, avait pris bien des initiatives, et savait énormément de choses; c'est sans doute pourquoi la justice française ne lui a rien demandé... Libéré de Fresnes, il mourra accidentellement le 31 mars 1947.
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