La véritable cellule de base : la popote ...
rideau
Par beaucoup de ses aspects, la vie de kommando relève de la sociologie des petits groupes. Extérieurement elle apparaît comme d'une grande cohérence. Dans l'ensemble, les prisonniers font bloc et, sauf rares exceptions, réagissent unanimement contre les Allemands, civils ou militaires. Une incontestable solidarité les unit. Ils se soutiennent, se défendent, s'aident mutuellement. Le nouvel arrivant est accueilli par tous. Peines et joies sont partagées.
Cette unanimité n'est toutefois vraiment réalisée que dans les instants qui mettent en cause le groupe tout entier, lors d'incidents particulièrement graves ou dans les kommandos à effectif très réduit. Partout, la véritable cellule de base est la « popote », qui groupe seulement quelques prisonniers et dont l'existence soulève quelques problèmes importants.
Dans les vicissitudes des premières semaines de captivité, les amitiés nées au cours de la drôle de guerre ont été souvent rompues. Le hasard d'une affectation a séparé des amis ou, au contraire, réuni des hommes qui ne se connaissaient pas, mais qui vont se trouver rapprochés par le jeu de facteurs très divers :
une identique origine géographique ; les Méridionaux se groupent, les Bretons se rapprochent , sociale; les paysans se trouvent plus en confiance les uns avec les autres, les hommes de la ville ont des réactions voisines et sympathisent rapidement , une même formation professionnelle ; ouvriers, fonctionnaires, commerçants... Le nouveau groupe n'est vraiment soudé qu'autant qu'il réagit identiquement et qu'entre ses membres s'établit une communauté d'intérêts attestée par la mises en commun des colis et le partage des sentiments.
Toute « popote » suppose une division du travail et une certaine hiérarchie de fait. Tel en est l'ambassadeur normal et parle au nom de tous ; tel se spécialise dans les problèmes de l'intendance et emploie tous les moyens, même les plus honnêtes, pour ravitailler ses compagnons ; tel, enfin, joue la bonne à tout faire et apporte au groupe les merveilles de son bricolage.
Ainsi, le kommando se fragmente en une série de cellules qui partagent, parfois avec d'âpres conflits ou des discussions sans cesse renaissantes, un local dont le cadre ressemble souvent plus à un taudis qu'à l'image que les services de propagande de Vichy ont cherché à répandre dans l'exposition sur la vie des camps. Saleté, odeurs violentes, brouhaha constant ; des lits à double ou à triple étage, des couches où pullule la vermine ; des pièces rarement aérées, nettoyées de façon irrégulière, dans lesquelles, le soir, on assiste aux scènes les plus diverses. Côte à côte, se heurtant, se bousculant, l'un fait sa toilette, l'autre bricole, celui-ci ajuste une semelle à une chaussure fatiguée, celui-là poursuit dans les coutures de ses vêtements d'irritants parasites. Affalé sur sa paillasse, cet autre rêve ou ronfle pendant qu'à ses côtés certains jouent aux cartes, discutent sur les derniers événements du conflit, spéculent sur l'avenir prévisible, s'informent des nouveaux bruits (bouteillons) qui circulent. Tout cela au milieu des cris, des jurons, des plaisanteries, des refrains et des sons les plus divers, qui ne semblent pas troubler un lecteur impénitent.
la popote dans les stalags
anecdote
accueil
Accueil
Les prisonniers