La dernière résistance
du chancelier Shuschnigg

Les blufs de Hitler

De retour à Vienne, Schuschnigg retrouva courage et détermination. Il décida de réaffirmer l'indépendance de l'Autriche et de soumettre, le dimanche 13 mars 1938, la nation entière à un plébiscite pour savoir si les Autrichiens souhaitaient ou non une Autriche libre, indépendante, sociale, chrétienne et unie.
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Nos frères subissent de cruelles souffrances

Seyss-Inquart avocat
Le 16 février 1938, le gouvernement Schuschnigg annonça un remaniement ministériel et une amnistie générale en faveur des détenus politiques. L'avocat Seyss-Inquart (photo) devenait ministre de la Sûreté, comme le dictateur l'avait souhaité. C'était placer un traître à la tête du maintien de l'ordre. Dans le même temps, l'amnistie libérait de prison les assassins du chancelier Dollfuss, abattu, quatre ans plus tôt, en juillet 1934, par des commandos nazis. C'était fournir des troupes aux agitateurs toujours en place et des renforts aguerris aux bandes excitées de jeunes gens qui saisissaient le moindre prétexte pour sortir leurs drapeaux à croix gammée, pour clamer leur foi en Hitler et exiger l'union avec l'Allemagne.
Le 20 février, le chancelier du Reich prononça un discours qui fut radiodiffusé en Autriche. « Pour une puissance mondiale, disait-il, il est intolérable de savoir qu'à ses côtés des frères de race subissent à chaque instant les plus cruelles souffrances parce qu'ils se sentent solidaires de la nation tout entière, en union avec elle, avec sa destinée et son Weltanschauung. C'est au Reich allemand de protéger les peuples germaniques qui ne sont pas en mesure d'assurer, par leur propre effort, le long de nos frontières, leur liberté politique et spirituelle. »
Informés discrètement de ce qui s'était dit à Berchtesgaden, le 11 février, les gouvernements de Londres et de Paris n'avaient pas réagi. La teneur du discours de Hitler n'eut pas plus d'effet. Pourtant, jamais le Führer n'avait si clairement désigné son objectif : Plus de dix millions d'Allemands vivent dans deux des Etats qui ont une frontière commune avec nous... Le sort de Vienne était scellé. Le tour de Prague viendrait bientôt. C'était cela que Churchill avait entendu.
L'Autriche vécut quatre semaines d'agonie. A Graz, en Styrie, le 24 février, 20 000 nazis envahirent l'hôtel de ville, amenèrent le drapeau rouge, blanc, rouge autrichien et montèrent, à sa place, le drapeau à croix gammée. A la même heure, à Vienne, le chancelier Schuschnigg jurait que l'Autriche ne renoncerait jamais à son indépendance et lançait un appel pour que le « rouge, blanc, rouge » soit défendu jusqu'à la mort...

Hitler s'étrangle de rage

Seyss-Inquart devient chancelier d'Autriche
A l'exception de ceux qui tombèrent sous les coups de la Gestapo et des hordes nazies, personne ne mourut pour le drapeau. Le gouvernement envoya le ministre nazi de la Sûreté, SeyssInquart, rétablir l'ordre à Graz... On imagine à quel point il fut efficace !
Alors, le chancelier se tourna vers les ouvriers autrichiens et leur principal parti (interdit) : le parti socialiste. Quatre ans plus tôt, Schuschnigg avait appartenu au gouvernement (celui de Dollfuss) qui les avait sauvagement écrasés. Il y avait eu des milliers de morts. Les dirigeants politiques et syndicaux avaient été emprisonnés. Du moins ceux qui avaient survécu. Schuschnigg leur promit de rétablir les droits politiques et syndicaux en échange de leur aide pour le maintien de l'indépendance.
Ce réalisme subit demeura toutefois à l'état d'intention. Il était trop tard. Schuschnigg se berçait d'illusions.
Le 9 mars, à Innsbruck, le chancelier annonça, pour le dimanche suivant, 13, la tenue d'un référendum appelant les Autrichiens à se prononcer sur l'indépendance de leur pays. Les électeurs (des deux sexes) devaient être âgés de vingt-quatre ans... Mais les listes électorales n'étaient pas établies. Quatre jours de campagne ne suffisaient pas à préparer sérieusement l'opinion... Et Hitler s'étrangla de rage.
Le vendredi 11 mars, il porta le coup décisif. Les journaux du monde entier, le lendemain, titrèrent sur toute la largeur de leur Une : « Le Reich viole l'Autriche ». Sur un ultimatum de Berlin, le plébiscite envisagé par Schuschnigg était « ajourné ». Le chef du gouvernement démissionnait, et Seyss-Inquart devenait chancelier. D'heure en heure, les événements s'étaient précipités.
Les journaux ne pouvaient pas encore savoir que ces nouvelles stupéfiantes étaient l'aboutissement d'un trafic téléphonique intense entre Berlin et Vienne.
Le Kriegspiel s'était déroulé comme l'avait organisé Hitler. Condamné d'avance par sa naïveté et son incapacité, le chancelier ne faisait plus que de la figuration.