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Les métiers oubliés...

Les derniers battements
du fléau

Comment vivaient
nos ancêtres

Les battages au fléau concernaient principalement le blé, l'avoine et les haricots. C'était un coup de main à attraper. On lève le fléau au-dessus de la tête et on le fait retomber, bien horizontalement, sur la botte. Le grain jaillit. On tape à deux, chacun de son côté et en cadence: pendant qu'un fléau est en l'air, l'autre frappe la gerbe, et ainsi de suite. Lorsqu'on est bien entraîné, il n'y a pas à craindre que les fléaux se heurtent

Manier le fléau

Les cartes postales ne mentent pas : on battait encore au fléau dans les premières années du siècle dernier, notamment dans les petites exploitations. On employait aussi le verbe égrener, bien qu'il s'appliquât surtout aux plantes fourragères. Cet exercice exigeait endurance et habileté. Le fléau était connu dès la plus haute antiquité. Il remplaça le système consistant à se saisir des tiges et à frapper les épis contre un corps dur et résistant, de façon à en dégager les grains.
Le fléau se compose de deux bâtons attachés bout à bout par une corde, une lanière de cuir ou un nerf de boeuf. L'une des parties de cet insrument est le manche, l'autre est le fléau proprement dit, ou batte. C'est avec cette dernière que l'on frappe les gerbes de blé. Ces deux pièces peuvent être de même longueur, mais, généralement, la batte, qui peut mesurer 80 cm et avoir 5 cm de diamètre, est plus courte que le manche. Un long fléau, avec un manche court, est de plus large portée, mais agit avec moins de force. La batte est faite d'un bois dur, hêtre ou néflier. Elle porte à son extrémité un noeud de bois qui ne doit présenter aucune aspérité. Le manche est souvent en chêne ou en châtaignier.
D'un mouvement ample et précis, l'ouvrier relève le manche au-dessus de sa tête et fait tourner la batte, comme le ferait un charretier avec son fouet, avant de l'abattre sur l'aire de battage en allongeant obliquement le bras de façon qu'elle retombe à peu près horizontalement sur les gerbes de blé. Il est important que la lanière qui attache le fléau au manche soit suffisamment souple pour permettre un tournoiement sans contrainte.

Le battage au fléau

le battage au fléau en 1900
Le battage au fléau se fait parfois en équipe. Celle-ci se compose de deux ou quatre personnes et plus, chaque équipier prenant soin de ne pas gêner son voisin. Mais les batteurs aguerris connaissent leur place et il n'est jamais besoin d'en discuter. On bat alternativement et en mesure, à un rythme régulier qui ne varie pas. Les batteurs accompagnent parfois leurs coups d'un chant particulier, mais cette impression de facilité ne saurait faire illusion.
Les années précédentes, quand j'allais aux champs dans la neige, raconte le paysan de la Vie d'un simple d'Émile Guillaumin, j'enviais les batteurs en grange. Mais, quand je dus faire le métier à mon tour, je m'aperçus que ce n'était pas tout rose non plus, que, si l'on conservait les pieds au sec, on se fatiguait joliment les bras et qu'on avalait par trop de poussière.
Le battage à cette époque, où tout s'écossait au fléau, durait depuis la Toussaint jusqu'au carnaval, voire même jusqu'à la mi-carême, sans interruption presque, sauf quelques journées après chaque mois, quand la lune était bonne pour couper les bouchures, ébrancher les arbres. Dans la journée, on battait seulement entre deux pansages. Mon début coïncidait avec une année d'abondante récolte, nous battions chaque soir jusqu'à dix heures à la lueur d'une lanterne. Je ne connais pas de besogne plus énervante que celle-là. Manoeuvrer le fléau du même train régulier pour conserver l'harmonie obligée de la cadence, ne pouvoir disposer d'une seconde pour se moucher, pour enlever le grain de poussière qui vous fait démanger le cou - quand on est encore malhabile et non habitué à l'effort soutenu, c'est à devenir enragé !

12 000 coups de fléau

le fléau dans les campagnes en 1900
Les fléaux ne battent jamais en même temps et ne se rencontrent pas. Lorsqu'un côté des gerbes est battu, on les retourne et l'on recommence autant de fois qu'il est nécessaire. Une gerbe de blé pesant de 8 à 9 kg exige au moins 150 coups de fléau. Soixante-dix gerbes de blé battues au cours d'une journée de travail de dix heures demanderont, par conséquent, environ 12 000 coups de fléau. Mais cette estimation peut varier selon le type de fléau utilisé ou selon la nature du froment. Doit être aussi pris en compte le nombre de batteurs, car un ouvrier seul, ou travaillant avec une seule personne, donne plus de coups de fléau que lorsque l'équipe comprend plusieurs batteurs.
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