L’Algérie de Borgeaud
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Le prototype des partisans de l'immobilisme, de la tradition, c'est Henri Borgeaud, sénateur radical d'Alger, d'origine suisse, propriétaire, sur les collines du Sahel d'Alger du domaine de la Trappe qui fournit, bon an mal an, 40 000 hectolitres de vin. Mais ce n'est là qu'une partie des biens de ce grand colon : outre l'autre propriété, où se récoltent 45 000 hectolitres et où l'on cultive 100 hectares d'agrumes, il y a aussi les cigarettes Bastos, sans compter de confortables positions d'administrateur au Crédit foncier d'Algérie et de Tunisie, aux Moulins du Chélif, aux Cargos algériens, à la Nord-Africaine des ciments Lafarge et à la Distillerie d'Algérie.
En 1954, en Algérie, on boit Borgeaud, on fume Borgeaud, on mange des agrumes Borgeaud, on place ou on emprunte Borgeaud.
Puissant par sa fortune, Henri Borgeaud l'est aussi par ses relations politiques : s'il contrôle à lui tout seul l'Algérois, il a dans le Constantinois un allié de poids en la personne de Miink, lui aussi radical bon teint, tandis qu'il possède, en France, un soutien non négligeable au Palais-Bourbon en la personne du député René Mayer. Enfin, sur le plan de l'opinion, les organes de presse tels que la Dépêche de Constantine, des frères Morel, ou l'Echo d'Alger, d'Alain de Sérigny, lui sont pratiquement acquis.

Sans être ostentatoire, la richesse des colons n'en est pas pour autant cachée. Pourquoi les pieds-noirs, défricheurs de terre, auraient-ils eu honte de leur réussite ? Combien de fois ne les a-t-on pas entendus dire :
 Ce pays, c'est nous qui l'avons fait. Nos ancêtres, en découvrant la plaine de la Mitidja, il y a plus de cent ans, n'y ont trouvé que de maigres pâtures, des troupeaux étiques et les fièvres inoculées par les moustiques pullulant dans les marécages.
Regardez à présent ce qu'elle est devenue : ce magnifique damier de cultures, où les champs de céréales alternent avec les orangeraies et les vignobles accrochés aux collines.
Puis, balayant d'un grand geste l'étendue de sa propriété, le colon avait l'habitude de conclure, faisant allusion aux fellaghas :  et maintenant, qu'est-ce qu'ils nous veulent, à nous ? La terre ? Elle nous appartient. Et puis, monsieur, l'Algérie, c'est la France, n'est-ce pas ?     

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